On attendait Big Eyes, de Tim Burton. On l’a vu. On s’en parle autour d’un verre. D’un double, même. Ce ne sera pas de trop pour étancher notre déception.
Par Christophe Chadefaud et Clément Sautet
Si vous avez manqué le début : A San Francisco, à la fin des années 1950, Margaret tombe amoureuse de Walter Keane, peintre, comme elle, mais le talent en moins. Après lui avoir volé son cœur, il lui pique la paternité de ses œuvres d’enfants aux grands yeux.
Je crois que je viens de franchir un cap…
Tu crois pas plutôt que c’est Burton qui vient d’en franchir un, de cap ? Lui qui a cédé son âme au grand méchant entertainment.
Pff… Le mec peut bien aller tourner Dumbo en live, Le manège enchanté sur la lune ou Les Bisounours à la montagne en IMAX 3D, j’en ai plus rien à faire. C’est vrai quoi, comment le génie qui a réalisé Edward aux mains d’argent peut-il faire ce Big Eyes pitoyable ?
C’est comme si sa carrière n’était qu’une longue descente. Dans Big Eyes, tout est si artificiel. Sa vision de la banlieue américaine formatée l’a rattrapé. Son cinéma n’a plus de substance. Dans ce film, on retrouve à peine sa touche. C’est à croire que l’enseigne “Tim Burton” est une imposture. N’importe qui aurait pu faire ce film.
Aïe ! Même maintenant, ça me fait encore mal de t’entendre dire des saloperies sur Burton… Je l’ai tant aimé… Et lui m’a tellement déçu. C’est clair que Big Eyes aurait pu être fait par n’importe qui. Même en oubliant que ce soit signé Burton, le film est vraiment mauvais. Christoph Waltz est en surjeu maximum, façon Jim Carrey des années 1990, face à une Amy Adams, confinée dans un rôle de naïve aux yeux de biche. Zéro relief nulle part. C’est exaspérant ! Mais excuse-moi, je m’énerve…
Non, c’est normal. On n’est jamais plus déçu que part ceux qu’on aime. De la part d’Amy Adams, je ne suis pas très étonné. Je ne lui ai jamais trouvé un quelconque pouvoir attractif. Pour Christoph Waltz, c’est plus grave. Mais si seulement il n’y avait que ça. Parlons de la narration. Tu n’as pas trouvé la voix off ridicule et dispensable ?
Même le rythme n’est pas soigné. Il s’ouvre comme Blue Jasmine – c’est prometteur – et il s’essouffle au bout des vingt premières minutes.
J’ai l’impression que le film souhaite traiter davantage de l’émancipation de la femme que de la vampirisation du talent. Tout va dans le sens de la confrontation artistique des deux personnages. On l’attend tellement qu’il fallait impérativement soigner le climax à venir. Mais non, Burton reste linéaire et son film reste plat de bout en bout.
Pour moi, Burton s’est complètement gouré de film. Là, il prend le parti de Margaret Keane. Ça ne fait aucun doute qu’elle soit l’auteure de ces toiles. Et on voit le résultat : ce biopic d’une platitude à pleurer. Burton aurait pu jouer sur l’ambiguïté de la paternité des œuvres, faire en sorte que l’on doute qu’elles soient d’elle ou de lui. Ca aurait été mille fois plus intéressant.
Le pauvre doit avoir les oreilles qui sifflent… Je suis d’accord avec toi. Il aurait pu aussi choisir le point de vue de la fille de Margaret. Son film n’a pas évité l’écueil de la facilité.
Bon, allez, je rentre chez moi pleurer devant Edward, Batman et Mars Attacks !
Personnellement, je crois que je vais plutôt faire une pause avec son cinéma.
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